Ouest
Soixante millions emportés dans les églises catholiques
C’est le bilan d’une série de coups effectués de manière successive par les bandits
Les bandits qui dévalisent les églises en série ces derniers temps dans la région de l’ouest, utilisent à quelques exceptions près, le même procédé. Ils débarquent toujours au moment où le clergé au grand complet est autour de la table pour le repas du soir. Bien renseignés, ils arrivent aussi au moment où, des «invités» quelques peu fortunés sont en visite dans ces presbytères. C’est ainsi qu’armés des fusils de fabrication traditionnelle, des machettes et des couteaux, ils tiennent sous leur menace les habitants des lieux, pour effectuer la fouille des personnes présentes et des locaux. Ils emportent comme magot des téléphones portables, des ordinateurs, des objets de décoration en matière de qualités qui permettent d’habiller les églises et d’argent des personnes présentes qu’ils complètent en visitant les caisses de l’intendant de la paroisse. Ils repartent le plus souvent à bord du matériel roulant de l’église qu’ils abandonnent quelque part, tout comme ils enfermant tout le personnel trouvé sur place dans l’une des chambres de l’église avant de vider les lieux.
L’ancien premier ministre Rwandais le Dr Dismas Nsengiyaremye et son frère Emmanuel Munyankumburwa, qui sont venus rendre visite à leur compatriote l’abbé Jean Paul Nsanzimana, ont été le vendredi 22 octobre 2010, des acteurs passifs de ces bandits. Ils étaient occupés à prendre leur repas vers 19h, lors que les brigands ont fait irruption dans la salle. Ils sont repartis après avoir soulager de plus de 2 millions de francs, les invités et les prêtres de la communauté des Lazaristes qui dirigent la paroisse du mont Carmel situé à l’entrée de la ville de Bafoussam. Les paroisses saint Antoine Depadoux de Bamendjou, Saint Denis de Batcham Fiela, saint Barthélemy de Bahouan, sainte Cécile de Kouogouo et de Batcham, ont subis des coups similaires. Le père Michel Toukam de la paroisse Sainte Cécile de Kouogouo Bafoussam, se rappelle que les bandits ont vidé son domicile et ses bureaux, juste au moment où il présidait la messe du soir le Vendredi 15 octobre 2010. Le temps de constater les dégâts après le culte, que les mêmes bandits arrivent en nocturne, pour emporter les ordinateurs et les autres outils de valeurs qu’ils avaient laissé lors de leur premier passage. A Banga le 14 octobre dernier, 3 de ces bandits sont allés en éclaireurs. Le premier était vêtu comme un prélat et les 2 autres en tenue de l’armée, s’affichaient comme ses adjoints. Dès que le portail a été ouvert, ils ont tôt fait de sortir leurs armes et de fouiller les lieux. Parmi les brigands qui ont été identifiés respectivement à Bahouan et à Batcham, certains sont reconnus comme des anciens chrétiens et employés de l’église. C’est pour cela que André Tassa le président du comité paroissial Justice et Paix au diocèse de Bafoussam, pense que le recrutement des vigiles, n’est pas la solution idoine. Au décompte actuel, le secrétaire à l’éducation privé catholique le père Kengne Tchamou Gabriel, considère que ce sont des énormes sommes d’argent qui ont été emportés. Le total des pertes, serait au delà de la somme de 60 millions de nos francs.
Honoré Feukouo
Abbé Robert Mathurin Kenfack
«Il faut que l’église prenne ses responsabilités en main»
Le vice responsable de la communication diocésaine de Bafoussam, déplore les attaques en séries des milieux religieux
Le fait que les bandits s’attaquent aux institutions religieuses surtout catholiques, est devenu une loi des séries dans la région de l’ouest. Que dit et pense l’église à ce sujet ?
On ne peut pas rester insensible à des choses comme ça. S’il y avait un message à dire, je n’hésiterai pas de dire à ceux qui sont entrain de perpétrer des actes comme ceux là, qu’ils sont entrain de voler dans leurs propres poches. Parce que ce qui appartient à l’homme appartient à Dieu, et ce qui appartient à Dieu, appartient à l’homme. Il faut savoir respecter ce qui appartient à Dieu parce que c’est ça que Dieu donne à l’homme. Si l’homme vient l’arracher par lui-même, c’est une malédiction qu’il est entrain d’attirer vers lui. Quand on s’attaque à Dieu ; je pense que c’est une façon de se moquer soi même. Je voudrai penser que en réalité le problème est une réaction qui affecte le temps et qui est entrain de prendre une autre dimension. C’est la dimension des personnes affamées, éprouvés et frustrés, qui à la longue, vont progressivement dans une certaine recherche de solution, et de plus en plus, ils n’en trouvent pas de satisfaisantes et commencent à aller jusqu'à se dire j’imagine, qu’il faut aller vers les milieux les plus juteux. Ils se disent que la mission est certainement le lieu qui est en même temps le riche et le fragile. Ils se disent que c’est facile de s y attaquer parce que en même temps, ils trouveront davantage ce qu’ils cherchent, et la meilleure brèche pour l’avoir. Parce que la mission a toujours été considérée comme le milieu où on a le plus facilement ce qu’on veut obtenir. Même si cela commence à devenir une particularité, c’est d’abord une généralité. C’est une réaction qui devrait être vue comme une recherche des solutions aux problèmes de la misère dans un pays. Un problème qui devient très sérieux, mais qui ne préoccupe pas en réalité ceux qui devraient intervenir pour cela.
Est-ce que l’église et tout le clergé n’envisage pas à songer à une solution comme l’autoprotection?
C’est vrai que quant il y aune insécurité, on doit absolument penser à faire quelque chose. Et l’église même a déjà pensé à mettre sur pied des stratégies de sensibilisation. Que l’église soit aujourd’hui attaquée, ça devrait être aujourd’hui une chose préoccupante parce que, s’attaquer à l’église c’est s’attaquer à Dieu. Et on est tous d’accord que l’église c’est un peu le lieu où tout le monde se replie quand les choses vont mal. On a même vu dans des situations de guerre, que généralement, l’église est un peu comme le lieu le plus sécurisé et qu’on s’y réfugie avec la certitude d’être entré dans les bras de Dieu. Malheureusement, avec ce qui est entrain de se faire, on ne peut passer que par une sensibilisation. Les prisonniers et les brigands, sont les enfants de Dieu, et s’ils se considéraient comme tel, ils ne viendraient pas à l’église arracher ce qui appartient à Dieu. Ils devraient plutôt trouver le moyen de donner à l’église de pouvoir continuer de dire ce que eux n’arrivent pas à dire. Encore faut t’il que l’église prenne ses responsabilités en main. Par rapport à la sécurité, on n’est jamais bien sécurisé, mais on doit passer par la prière, la sensibilisation et le minimum de sécurité matérielle qu’on peut avoir, quitte à ce que les gens prennent surtout conscience qu’ils doivent respecter ce qui est à Dieu. Ils peuvent venir autrement que comme brigands. Si jamais ils avaient le courage de se rapprocher de Dieu, je pense qu’ils trouveraient même la solution à leurs problèmes.
Propos recueillis par Honoré Feukouo
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