mercredi 10 novembre 2010

Ouest; les bandits dépouillent les églises en série


Soixante millions Fcfa volés au cours de six attaques.
Les bandits qui dévalisent les églises ces derniers temps dans la région de l’Ouest ont, à quelques exceptions près, le même mode opératoire. Ils débarquent quand le clergé, au grand complet, est autour de la table pour le repas du soir. Bien renseignés, ils se pointent aussi lorsque des «invités» fortunés sont en visite dans ces presbytères.
Armés de pistolets de fabrication traditionnelle, de machettes et de couteaux, ils tiennent la maisonnée en respect pour effectuer la fouille des locaux et des occupants. Comme butin, ils emportent des téléphones portables, des ordinateurs, des objets de décoration pour l’habillage des églises et de l’argent. Ils font souvent halte à la caisse de l’intendant de la paroisse. Et repartent le plus souvent à bord de véhicules appartenant à la paroisse, qu’ils abandonnent quelque part, après avoir enfermé le personnel trouvé sur place dans l’une des chambres du presbytère.
L’ancien premier ministre rwandais, le Dr. Dismas Nsengiyaremye et son frère Emmanuel Munyankumburwa, qui sont venus rendre visite à leur compatriote l’abbé Jean Paul Nsanzimana, ont été, le vendredi 22 octobre 2010, victimes de ces bandits. Ils prenaient leur repas vers 19h, lors que des brigands ont fait irruption dans la salle. Ils sont repartis après avoir pris de plus de 2 millions de francs Cfa aux invités et  aux prêtres de la communauté des Lazaristes qui dirigent la paroisse du mont Carmel, située à l’entrée de la ville de Bafoussam. Les paroisses saint Antoine Depadoux de Bamendjou, Saint Denis de Batcham Fiela, saint Barthélemy de Bahouan, sainte Cécile de Kouogouo et de Batcham, ont subi des coups similaires.
Le père Michel Toukam de la paroisse Sainte Cécile de Kouogouo Bafoussam se rappelle que les bandits ont vidé son domicile et ses bureaux, juste au moment où il disait la messe du soir, le vendredi 15 octobre 2010. Le temps pour lui de constater les dégâts après la messe, les mêmes bandits sont revenus la nuit,  pour emporter des ordinateurs et d’autres outils de valeurs laissés lors de leur premier passage. A Banga, le 14 octobre dernier, trois de ces bandits sont allés en éclaireurs. Le premier était vêtu comme un prêtre et les deux autres portaient des tenues militaires.  Dès que le portail a été ouvert, ils ont tôt fait de sortir leurs armes et de fouiller les lieux. Parmi les brigands qui ont été identifiés respectivement à Bahouan et à Batcham, certains sont reconnus comme des anciens chrétiens et employés de l’église. André Tassa, le président du comité paroissial Justice et Paix au diocèse de Bafoussam, pense que le recrutement des vigiles n’est pas la solution idoine. Au décompte actuel, le secrétaire à l’éducation privée catholique le père Kengne Tchamou Gabriel, considère que ce sont d’énormes sommes d’argent qui ont été emportées. Le total des pertes serait au delà de la somme de 60 millions de nos francs.
Honoré Feukouo

Abbé Robert mathurin kenfack :  «Ils sont en train de voler dans leurs propres poches» *
Le vice responsable de la communication diocésaine de Bafoussam, déplore les braquages en séries contre les milieux religieux.
Que pense l’Eglise des attaques répétées dont les paroisses catholiques sont l’objet dans la région de l’Ouest ?
On ne peut pas rester insensible à des choses comme celles-là. S’il  y avait un message à faire, je n’hésiterais pas à dire à ceux qui commettent ces actes là, qu’ils sont en train de voler dans leurs propres poches. Parce que ce qui appartient à l’homme appartient à Dieu, et ce qui appartient à Dieu appartient à l’homme. Il faut savoir respecter ce qui appartient à Dieu parce que c’est ça que Dieu donne à l’homme. Si l’homme vient l’arracher, c’est une malédiction qu’il attire sur lui. Quand on s’attaque à Dieu, je pense que c’est une façon de se moquer de soi même. Je voudrais penser qu’il s’agit ici de personnes affamées, éprouvées et frustrées, qui vont dans une recherche de solution. De plus en plus, ils n’en trouvent pas et commencent à se dire qu’il faut aller vers les milieux les plus juteux. Ils se disent que la mission est certainement le lieu qui est en même temps le riche et le fragile. Ils se disent que c’est facile de s’y attaquer. La mission a toujours été considérée comme le milieu où on a le plus facilement ce qu’on veut obtenir. C’est une réaction qui devrait être vue comme une recherche des solutions aux problèmes de la misère dans un pays. Un problème qui devient très sérieux, mais qui ne préoccupe pas ceux qui devraient intervenir pour cela.
L’Eglise envisage-t-elle un renforcement des mesures de sécurité ?
C’est vrai que quand il y a insécurité, on doit absolument penser à faire quelque chose. Et l’Eglise a déjà pensé à mettre sur pied des stratégies de sensibilisation. Que l’église soit aujourd’hui attaquée, ça devrait être une chose préoccupante. On est tous d’accord que l’Eglise est un peu le lieu où tout le monde se replie quand les choses vont mal. On a même vu, dans des situations de guerre, que l’Eglise est un lieu sécurisé. On s’y réfugie avec la certitude d’être entré dans les bras de Dieu. Malheureusement, avec ce qui se passe, on ne peut passer que par une sensibilisation. Les prisonniers et les brigands sont les enfants de Dieu, et s’ils se considéraient comme tel, ils ne viendraient pas à l’Eglise arracher ce qui appartient à Dieu. Ils devraient plutôt trouver le moyen de donner à l’Eglise afin qu’elle puisse continuer à dire ce que, eux, n’arrivent pas à dire. Ces visiteurs peuvent venir autrement que comme des brigands. Si jamais ils avaient le courage de se rapprocher de Dieu, je pense qu’ils trouveraient même la solution à leurs problèmes.
Propos recueillis par
 Honoré Feukouo

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