Le Nemo ou le Tchouong selon les appellations, est une case bâtie pour symboliser l’unité d’un village et de son peuple autour de son fo’o.
Dès qu’on franchi l’accès principale dans la majorité des chefferies Bamiléké, on se heurte à une grande case, qui s’impose comme un ombrage. Le nom donné à cette case, dépend des langues parlées localement. On l’appelle le Nemo à Bamendjou, et Bandjoun, ou le Tchouong à Bafoussam. La traduction littérale laisse entendre qu’il s’agit de la grande case de ralliement et d’unité du village. Pour le chef Bafoussam Njitack Ngompé Pelé «c’est le symbole de l’identité du peuple, parce qu’un peuple s’identifie par rapport à sa grande case. Celle de la chefferie Bafoussam date de 1958.»
A la chefferie Bamendjou, Le FO Sokoundjou Jean Rameau qui présente le Nemo comme le symbole de l’existence du peuple Bamendjou, nous confie qu’ils viennent d’achever la réfection de la toiture en paille. Une chose pas toujours aisée, puisque à écouter le FO Sokoundjou Jean Rameau « Il y a un certain nombre de rituels qu’il faut exécuter avant de construire cette case. Les sages et les initiés du village, doivent commencer par regarder tout les contours liés à la période de construction, et aux rites de purification du village, afin d’autoriser le lancement des travaux. Construire cela n’est pas donné au premier venu. Ce sont les meilleurs techniciens du village qui sont aux avants postes lors de la construction, et tous les hommes du village doivent apporter leur appui. C’est cela le signe de l’unité du village autour de sa chefferie et de son chef. Si cette unité n’est pas prouvée à cet instant, cela veut dire que le chef doit se remettre en question, et se mettre autour de son peuple pour réconcilier les uns et les autres jusqu'à ce que l’unité soit acquise avant qu’on continue la construction de cette case.»
Le Nemo est une case qui est entièrement construite en matériaux locaux. Les bambous et la terre battue permettent de confectionner le mur. Les grands arbres choisis pour leurs résistances, sont ensuite sculptés et implantés comme les poteaux piliers de cette case et de l’histoire du village. En observant chacun de ces sculptures, qui se suivent sur un même tronc, le conservateur de la chefferie Bandjoun nous relate les grands faits marquants de cette communauté. Ils vont de la création du groupement Bandjoun avec l’image de son premier souverain, à la présentation du chef actuel Honoré Djomo Kamga. D’autres images comme la période de l’incendie de la chefferie et des faits modernes avec les victoires du Cameroun en coupe d’Afrique des nations y figurent également. Cette architecture soutient une charpente faite à base des eucalyptus. La paille permet de couvrir tout cet ensemble. «Compte tenu de la rareté de la paille, nous avons été obligés de mettre un peut de modernisme avec quelques feuilles de tôles pour consolider le Tchouong, tout en la maintenant dans sa structure originelle comme vous l’avez vue.» Dit le chef Bafoussam, pour expliquer la présence des tôles sur la toiture de la case Tchouong.
Lorsqu’il est question de visiter l’intérieur de ces cases, les gardiens de la tradition deviennent réticents. Le chef Bafoussam se contente de faire une description «Elle a 25m de long et 24 m de large, soit plus de 500m2 de battisse. Il y a à l’intérieur, ce que je peux appeler le couloir confidentiel du chef de village. Il y a aussi la salle de réunion des 9 notables, celle des 7 notables, la salle des guerriers que nous appelons ici Mendjouong, qui s’est un peu cachée à l’intérieur. Dès l’entrée, à travers l’ouverture que vous observez, on voit la grande case des conférences où l’on célébrait et où nous continuons d’ailleurs à célébrer les mariages traditionnels et à trancher quelques litiges qui concernent le village. Il y a par exemple à l’intérieur le passage de vérité. C’est-à-dire que ceux qui une fois à l’intérieur profèrent un mensonge, ce sera à leurs risques et périls.»
Honoré Feukouo
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